Source: Conseil de la Nation Anishnabe de Lac Simon
Publié le 15 Décembre 2019
Or, nous avons appris avec stupéfaction dans les médias mercredi dernier que M. Pierre Dufour, ministre du MFFP, suggérait que les populations de moins de cinquante (50) bêtes devraient être laissées à l’abandon. D’une part, cette déclaration nie les engagements de son gouvernement auprès du gouvernement fédéral et des Premières Nations et, d’autre part, remet en cause les montants et le temps investis dans le cadre de la signature de cet Accord.
En agissant ainsi, le ministre Dufour bafoue délibérément les droits des peuples autochtones à l’autodétermination et au maintien des éléments culturels et naturels qui sont les fondements de leur identité, tels que reconnus par la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones. Cette Déclaration fondamentale à la reconnaissance des droits des Premières Nations et Inuit a par ailleurs été adoptée par une motion unanime à l’Assemblée nationale, le 8 octobre 2019, tel que recommandé par le rapport de la Commission Viens.
Dans ce contexte, la disparition progressive des caribous de Val-d’Or serait considérée par Lac Simon comme une atteinte à ses droits ancestraux. Doit-on rappeler que les Premières Nations sont un pilier important dans la gestion responsable et durable des écosystèmes, pour le bien-être des générations actuelles et futures, surtout dans un contexte où l’environnement n’a jamais été autant au cœur des préoccupations populaires et scientifiques? Pourtant, le ministre Dufour semble prioriser le droit des villégiateurs, des travailleurs et de l’industrie (forestière, récréative et touristique), au détriment des droits ancestraux des Premières Nations, tels que reconnus par la Cour suprême du Canada.
Pour Mme Adrienne Jérôme, Cheffe de Lac Simon, cette situation est inacceptable : « Il est tout à fait inadmissible de regarder la situation des caribous se dégrader sous nos yeux jusqu’à ce qu’elle atteigne un niveau critique et de dire ensuite qu’il est trop tard pour faire quelque chose. D’autant plus que le gouvernement du Québec savait depuis fort longtemps que le régime des terres qu’il met en place dans l’habitat du caribou mène directement à sa disparition. »
La réduction des populations de caribous forestiers est inhérente à l’exploitation forestière et le ministre Dufour ne peut pas le nier. « Les « coûts prohibitifs » liés à la sauvegarde des caribous forestier auxquelles fait référence le ministre sont la conséquence directe des efforts nettement insuffisants mis en œuvre par le gouvernement dans la protection de l’habitat de cet animal » affirme Geneviève Tremblay, biologiste pour Lac Simon. Ainsi, justifier l’abandon d’une espèce sur nos territoires ancestraux sous prétexte que les coûts sont prohibitifs nous paraît aberrant, d’autant plus qu’une part importante de ces coûts est assumée par le gouvernement fédéral.
Rappelons encore une fois que les forêts, en plus de servir de milieu naturel à la faune, fournissent à la société de multiples bénéfices : la purification de l’air, la rétention des eaux de ruissellement, la séquestration du gaz carbonique, etc2. Selon cette étude, ces services peuvent représenter jusqu’à 1,1 milliard de dollars, seulement pour la région de la Capitale Nationale. La perte de ces services constitue cependant de réels coûts prohibitifs pour la société, qu’aucune création d’emploi ne saurait combler.
Enfin, nous sommes d’avis que le gouvernement fédéral et les autres Premières Nations au Québec et au Canada devraient s’inquiéter d’une telle prise de position de la part du ministre Dufour à l’égard des petits cheptels de caribous, puisque celle-ci suggère qu’il serait acceptable que toutes les autres populations isolées soient également laissées à l’abandon.