Au bord du gouffre, la harde de Val-d’Or a besoin de diversité génétique pour survivre.
Source: David Rémillard, Radio-Canada

Le caribou est une espèce menacée au Canada. (Photo d’archives)
Le ministère de la Faune du Québec prévoit déménager un caribou de l’enclos de Charlevoix vers la population de Val-d’Or, où les quelques survivants mis en captivité il y a cinq ans peinent à produire des nouveau-nés. Le mâle aura la délicate mission de féconder l’une des quatre femelles toujours en vie.
Trois populations de caribous sont totalement ou partiellement en enclos au Québec en raison de leur état critique.
Les caribous forestiers de Val-d’Or et de Charlevoix sont condamnés à la captivité permanente depuis respectivement 2020 et 2022. Des transferts de caribous montagnards de la Gaspésie vers des enclos de maternité ont également lieu depuis quelques hivers afin d’assurer la mise-bas des femelles et la survie des faons.
Contrairement au caribou de Charlevoix, qui prend du mieux sous la protection de l’enclos, la population de Val-d’Or stagne malgré des soins similaires.
Après des naissances ayant fait passer le troupeau de sept à neuf individus, aucun jeune n’est né en 2023 et en 2024. Un faon a finalement vu le jour ce printemps, mais un mâle est également décédé lors de même période. Le ministère de la Faune confirme également la mort d’un autre mâle récemment, portant le troupeau à 8 caribous.

Ce faon est né en captivité en 2025 dans l’enclos de Val-d’Or. (Photo d’archives). Photo : Gracieuseté : Jade Piché, MELCCFP
Diversité génétique
Un projet de supplémentation génétique est prévu par Québec depuis au moins deux ans afin d’aider le caribou de Val-d’Or à procréer. L’idée première était de capturer six caribous au sein de la population de Témiscamie, vivant à l’état sauvage dans le nord du Québec et dont on dénombrait 2500 individus selon un inventaire produit en 2019.
Québec a cependant reporté le projet en raison d’un désaccord avec les Premières Nations concernées. Elles ont réclamé un plan de restauration de l’habitat du caribou de Val-d’Or avant d’autoriser l’opération prévue par le ministère de la Faune.
Faute d’un horizon où la harde serait libérée et autosuffisante à l’état sauvage, pas question de condamner des caribous de Témiscamie à la captivité.

Bernard Drainville, qui a succédé à Benoit Charette comme ministre de l’Environnement, n’a toujours rien annoncé depuis son entrée en poste. (Photo d’archives). Photo : Radio-Canada / André Vuillemin
Or, le gouvernement Legault n’a toujours pas présenté de stratégie de protection de l’habitat du cervidé, pourtant protégé par la Loi sur les espèces en péril au Canada et par la Loi sur les espèces menacées ou vulnérables au Québec.
Seuls deux projets pilotes ont jusqu’ici été présentés, ne ciblant que les hardes de Charlevoix et de la Gaspésie. Dans le cas de Val-d’Or, Québec n’a pas dévoilé de plan particulier.
Aucun plan de libération des bêtes ni aucun échéancier n’a été présenté dans le cas des trois populations menacées.
Mesure d’urgence
Pendant que les décisions politiques se font attendre, les biologistes du gouvernement maintiennent la pression. Selon nos informations, certains s’inquiètent du maintien de la harde en attendant les mesures de restauration de son habitat naturel.
Le taux de perturbation de l’habitat du caribou de Val-d’Or était de 76 % au moment de sa mise en enclos. Québec travaille à des scénarios de restauration ramenant le taux de perturbation plus près de 35 %, sur un horizon de 50 ans. Au rythme où vont les choses et sans recrutement de nouveaux faons, impossible de maintenir la harde en vie aussi longtemps.

L’avenir du caribou de Val-d’Or est compromis si le recrutement ne s’améliore pas au sein de la harde. (Photo d’archives). Photo : Ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs / Amélie Morin
D’autant plus qu’aucune mesure supplémentaire n’a encore été annoncée dans l’aire de répartition du caribou de Val-d’Or.
Le ministère demeure convaincu de la pertinence d’une supplémentation à Val-d’Or et, à cet égard, plusieurs scénarios sont actuellement à l’étude
, indique une porte-parole du ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs (MELCCFP).
L’un d’eux a récemment pris le dessus après l’échec du plan A.
Le ministère en est à l’étape d’informer les communautés autochtones concernées afin de recueillir leurs commentaires sur un projet éventuel de transfert d’un caribou mâle
, poursuit la porte-parole, confirmant les informations obtenues par Radio-Canada de diverses sources.
En parallèle, le ministère tente toujours de convaincre les communautés autochtones de permettre une capture plus nombreuse.
Cette démarche n’exclut pas la poursuite des discussions avec les autres communautés autochtones concernant un scénario de supplémentation visant un nombre plus important de caribous provenant d’une population en milieu naturel.


