Source: David Rémillard

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Le ministre des Forêts, de la Faune et des Parcs accuse l’un des principaux spécialistes québécois du caribou forestier de critiquer le gouvernement depuis « sa tour d’ivoire » à l’Université du Québec à Rimouski (UQAR).

Le ministre Pierre Dufour a décoché ses flèches à l’endroit de Martin-Hugues St-Laurent, professeur d’écologie animale à l’UQAR, lors d’une mêlée de presse à l’Assemblée nationale, mercredi matin.

C’est facile d’être assis dans sa tour d’ivoire à l’université de Rimouski et de dire : « Voici comment ça fonctionne », a lancé le ministre au sujet de M. St-Laurent, qui possède un doctorat en biologie et qui a effectué un stage postdoctoral sur le caribou.

M. St-Laurent dirige également une équipe de recherche en gestion de la faune terrestre, laquelle mène plusieurs projets sur le caribou forestier.

Le chercheur s’est fait très critique du gouvernement actuel et des gouvernements passés, ces dernières semaines, au sujet de la protection de la gestion de l’habitat du caribou.

Notamment parce que Québec a autorisé cet hiver l’abattage de loups à Val-d’Or et Charlevoix, où les hardes contiennent chacune moins d’une trentaine de bêtes.

La déprédation aérienne est une mesure que M. St-Laurent qualifie « d’extrême » et qui ne fonctionne que si de larges réserves d’habitat essentiel sont protégées.

Le Ministère a aussi réhabilité 46 000 hectares de forêts pour l’exploitation forestière au Saguenay–Lac-Saint-Jean. Les massifs en question faisaient l’objet d’une protection administrative pour le caribou forestier.

Les gouvernements n’ont pas beaucoup de leadership pour décider de conserver de grands placards d’habitat commercial et de freiner les coupes forestières, a notamment déclaré M. St-Laurent dans l’une de ses nombreuses interventions publiques.

À court de solutions

Le chercheur milite pour la protection des vieilles forêts et pour toute mesure qui permettra de cesser le rajeunissement des écosystèmes forestiers, lequel favorise la prédation et d’autres espèces que le caribou.

Sur cet enjeu, le ministre a admis son impuissance.

Si M. St-Laurent est capable de faire repousser une forêt mature – comme il dit toujours : « Ça prend une forêt mature » –, s’il est capable de me repousser une forêt en l’espace d’un an, qu’il me le dise, parce que je n’ai pas la solution, a-t-il dit.

Quand les journalistes ont proposé la piste d’éviter de couper les vieilles forêts, M. Dufour a proposé de « dire les vraies affaires ».

« La forêt, c’est une manière d’exploiter économiquement quelque chose qui repousse. Mais c’est sûr que ça peut avoir un effet sur le caribou, on ne se le cachera pas. Un moment donné, on va se dire les vraies affaires aussi. »

Pierre Dufour, ministre des Forêts, de la Faune et des Parcs

Joint mercredi, Martin-Hugues St-Laurent n’a pas voulu se lancer dans une guerre de mots avec le ministre. Il continuera, a-t-il dit, de travailler avec « les fonctionnaires très compétents » du Ministère, comme il le fait depuis des années.

Il maintient cependant ses récentes critiques, à savoir que l’industrie forestière prend trop de place sur l’habitat du caribou, un problème connu depuis longtemps.

Cette contre-attaque du ministre Dufour est une deuxième en autant de jours au ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs. Le Ministère a fait parvenir une mise en demeure à Henri Jacob, de l’Action boréale, pour des propos tenus contre un haut fonctionnaire.

Politique faunique

Le ministre Dufour a terminé son point de presse de manière plus sereine, invitant tous ceux qui ont des solutions à proposer à entrer en contact avec son cabinet.

M. Dufour a aussi rappelé que le Ministère présentera l’an prochain sa politique faunique, laquelle devrait permettre de mieux protéger le caribou dans ses environnements les plus propices.

Si une telle politique était en place, des territoires seraient « maximisés pour la protection du caribou ».