Source: Journal de Montréal
Le Saguenay-Lac-St-Jean, la troisième plus grande région du Québec, 106 508 km2 de territoire dont 80 % est recouverts de forêts. On pourrait croire que lors du récent exercice du gouvernement pour la création de nouvelles aires protégées, il eut été facile de trouver dans un aussi vaste territoire des zones naturelles propices à la protection de la biodiversité d’autant plus que la région présentait un fort taux de carence en aires protégées.
Deux importants projets étaient d’ailleurs sur la liste des candidats présentés par le ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques, soit celui de la rivière Péribonka et celui du lac Kénogami.
Mais le ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs s’est opposé à ces deux projets citoyens de grande valeur pour donner son accord à un seul petit projet de 46 km2 sur la rivière Belley, projet qui avait été proposé par l’industrie forestière lors de l’appel de projets de la Conférence régionale des élus en 2012.
Alors qu’à seulement quelques kilomètres plus au nord, le territoire exceptionnel de la rivière Péribonka présentait tous les critères de qualité pour la création d’une aire protégée d’exception, le gouvernement a fait le choix d’une zone couverte de marécages, qui est traversée de part en part par une ligne de transport d’énergie et qui de surcroît, est contiguë à un site d’enfouissement où toutes les municipalités autour du lac Saint-Jean sont venues déverser leurs déchets pendant 32 ans.
De toute évidence, un choix basé sur le seul critère qu’il n’y avait pas de forêt à couper, un choix qui favorise la protection de la possibilité forestière au détriment de la biodiversité, un choix qui jette le mépris sur le travail bénévole de citoyens qui réclament depuis plus d’une décennie la protection d’un territoire de grande valeur environnementale et écotouristique.
La rivière Péribonka attend son tour
Pendant ce temps, un des plus beaux joyaux du patrimoine naturel du Québec, la rivière Péribonka, attend encore son tour d’être protégée. Des paysages spectaculaires à l’image d’un fjord, des forêts à haute valeur de conservation, des forêts rares, des écosystèmes forestiers exceptionnels, trois espèces menacées dont le caribou des bois, des milieux humides, un potentiel écotouristique de calibre international, mais tout ça ne représente aucune valeur pour le gouvernement.
La région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, en manque criant de diversification économique, n’aura qu’à axer son développement écotouristique sur les visites organisées d’un dépotoir. La région a été particulièrement défavorisée dans cet exercice douteux qui visait à ajouter des aires protégées mais seulement là où ça ne dérangeait pas l’industrie forestière. Pourtant, le projet de la rivière Péribonka n’avait qu’un impact négligeable sur la possibilité forestière; 10 000 m3 de bois accessible éparpillé sur 80 km n’est tout simplement pas rentable pour l’industrie. C’est vraiment à se demander si le MFFP s’est donné la peine d’effectuer les calculs, c’est vraiment à se questionner sur le sérieux de la démarche.
Une région « sacrifiée »
De région « ressource », la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean est maintenant devenue région « sacrifiée » au détriment des citoyens qui l’habitent, au détriment de la nature et de sa biodiversité.
Dans la loi sur l’aménagement durable du territoire forestier, il est spécifié que « les valeurs et les besoins exprimés par les populations concernées doivent être pris en compte dans les choix de développement du territoire forestier ».
Dans cet exercice d’ajout de nouvelles aires protégées, le gouvernement a totalement occulté les valeurs environnementales des citoyens du Saguenay-Lac-Saint-Jean, il a outrageusement ignoré leurs besoins de sauvegarder leur patrimoine naturel et il a poussé l’injure jusqu’à leur consentir une seule petite aire protégée qui avoisine un dépotoir, comme si la région n’avait pas mieux à préserver et comme si les citoyens ne méritaient pas mieux. Dans cet exercice insultant pour la population de toute une région, il s’avère évident que le gouvernement n’a pas respecté la loi, ni dans sa lettre ni dans son esprit.