Date: 2 novembre 2017
Source: Louise Hénault-Ethier, Fondation David Suzuki
Le caribou, c’est l’une des espèces les plus emblématiques du Canada. On l’associe à nos hivers, à nos forêts. C’est aussi une espèce menacée. Le gouvernement fédéral a confirmé le 31 octobre 2017 que l’habitat du caribou continue de se détériorer au pays et que les populations poursuivent un déclin alarmant. Il faut savoir que le caribou forestier a besoin de vastes écosystèmes forestiers intacts pour survivre et prospérer. Or, les activités industrielles d’exploitation des ressources naturelles contribuent à découper son habitat et à l’isoler sur des territoires morcelés, où sa survie peut difficilement être assurée.
L’espoir de voir cette espèce se redresser était pourtant permis : il y a cinq ans, le gouvernement fédéral publiait son Programme pour le rétablissement du caribou. Il avait été chargé, en vertu de la Loi sur les espèces en péril, d’élaborer un tel programme qui délimiterait « l’habitat essentiel » du caribou – c’est-à-dire l’habitat dont dépendent la survie et le rétablissement des populations. On savait alors que 37 des 51 populations de caribous n’étaient plus autosuffisantes et que, par conséquent, il était nécessaire d’agir rapidement.
Les provinces n’agissent pas et les bouleversements dans l’habitat du caribou s’accentuent, tout comme le déclin de l’espèce.
Le gouvernement fédéral a chargé les provinces et les territoires de gérer les forêts de manière à ce qu’une superficie représentant minimalement 65 % de l’habitat demeure intacte dans chaque aire de répartition du caribou, afin de donner aux populations une chance de se rétablir et de prospérer à long terme. En clair, les zones géographiques où vivent les caribous devaient être protégées en majeure partie des perturbations industrielles. Ces plans étaient requis et attendus le 5 octobre 2017 : aucune province ni territoire n’a respecté la date limite.
Le 31 octobre 2017, Ottawa a déposé son Rapport sur les progrès de la mise en œuvre du programme de rétablissement du caribou. On y fait état de perturbations dans plus de la moitié de l’aire de répartition depuis la publication, en 2012, du programme. Bref : les provinces n’agissent pas et les bouleversements dans l’habitat du caribou s’accentuent, tout comme le déclin de l’espèce. Le Québec compte parmi les nonchalants.
Par voie de communiqué, le gouvernement déclarait que le caribou constitue un « indicateur clé de la santé de la forêt boréale » et qu’il est déterminé à « protéger les espèces en péril dans cette vaste étendue de forêt canadienne ». Si les provinces négligent de mettre en place les mesures nécessaires pour éradiquer ce mal qui affecte nos caribous et redonner sa santé aux forêts, le gouvernement fédéral devra utiliser les outils prévus dans la Loi sur les espèces en péril pour constituer un filet de sécurité pour cette espèce menacée. Espérons que cette mesure extrême ne sera pas nécessaire.
Sans le caribou, c’est la forêt elle-même qui est menacée.
La relation étroite entre l’ampleur des perturbations de l’habitat et le fait qu’une population locale de caribous décline, augmente, ou demeure stable a été clairement établie scientifiquement. Québec est capable de présenter un plan de conservation qui tienne la route. Ce qui manque actuellement, c’est la volonté politique de tenir compte de ces connaissances et de gérer la forêt boréale de façon à préserver l’habitat essentiel du caribou.
Le caribou contribue de manière très importante à la santé de notre forêt boréale. Sans le caribou, c’est la forêt elle-même qui est menacée. La meilleure façon de préserver les emplois forestiers à long terme est de protéger le caribou.